Le
risque sanitaire lié à l'environnement
dans la pratique du canoë ou du kayak
en Communauté européenne : aspects microbiologiques.
Alain HELUWAERT
docteur en médecine
Résumé :
Les répercussions sanitaires microbiologiques des activités
nautiques de loisir en eaux polluées sont reconnues comme
bénignes et d'une fréquence difficile à cerner.
Mais pour les usagers, le risque subjectif, apparent, est plébiscité
comme un réel problème de santé publique.
L'eutrophisation par les phosphates de nombreux lacs et plans d'eau
fait émerger un risque sanitaire nouveau lié à
la prolifération estivale de cyanobactéries allergisantes
voire hépatotoxiques. Ce phénomène a son équivalent
en mer avec les phénomènes "d'eaux rouges"
pouvant propager des neurotoxines ou des entérotoxines thermostables
et cause d'interdictions régulières de ramassage de
la faune littorale.
La pratique du canoë ou du kayak ne saurait être assimilée
à la baignade, du simple fait que, dans certaines disciplines,
il y a immersion du corps entier ou ingestion accidentelle d'une
quantité non négligeable d'eau. Il n'y a pas lieu,
compte tenu de la modicité du risque, de prévoir une
règlementation sanitaire microbiologique pour une pratique,
sporadique dans le temps et l'espace, du canoë-kayak : une
détection et une information adaptées aux risques
locaux potentiels sont suffisantes. Par contre la sur-fréquentation
massive tant dans le temps que de l'espace de certains sites de
pratiques nautiques justifie une pression pour réduire les
nuisances . Il faut que la qualité des eaux et les moyens
pour l'obtenir satisfassent les usagers et soient règlementés
: Stations d'épuration fonctionnelles, règlementation
de l'hygiène, des accès et du camping, implantation
de toilettes et de circuits d'évacuation des déchets.
Le risque d'anthropo-zoonose est dominé par la leptospirose,
méconnue des médecins du fait de sa rareté,
mettant en jeu la vie du sujet infecté s'il n'est pas rapidement
traité. Le risque pathogène lié aux tiques
en Europe du Nord et Centrale devient un réel problème
de santé publique (maladie de Lyme, encéphalite à
tiques d'Europe). La fasciolose hépatique, devenue anecdotique
en France, ne l'est pas dans les régions ouest de la Grande
Bretagne et de l'Irlande, visitées par des kayakistes marins
aventureux. Enfin il faut savoir suspecter la trichobilharziose
aviaire dans les causes d'une dermite estivale lors du bain ou de
l'esquimautage dans les grands lacs alpins (lac Léman).
La révision de la directive européenne sur les eaux
de baignade a pour objectif d'améliorer la qualité
sanitaire des eaux destinées aux pratiques des loisirs. Il
est à craindre qu'elle ne donne aussi des bases juridiques
aux autorités locales qui, pour se couvrir, trouvent plus
économique d'interdire les pratiques nautiques plutôt
que de se donner les moyens d'assainir les eaux.
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