COLLOQUE MÉDICO-SPORTIF F.F.C.K. LYON 1986

MÉTHODOLOGIE ET ENQUÊTE SUR LA PATHOLOGIE DE L'ÉPAULE EN CANOË-KAYAK

Dr PHILIPPE GRIPPON

INTRODUCTION

Le membre supérieur est très sollicité au cours de la pratique du canoë-kayak. Intuitivement nous avons la notion qu'il existe une pathologie au cours de cette pratique. Notre objectif a donc été :

• D'évaluer la pathologie de l'épaule induite par le canoë-kayak,

• de découvrir les pratiquants les plus exposés,

• les situations ou les gestes les plus traumatisants,

• d'évaluer les différentes thérapeutiques utilisées et leur efficacité, d'après les athlètes.

Le but final :

• Mettre en place une prévention adaptée,

• optimiser les traitements.

Ce travail, réalisé en collaboration avec Bernard JACQUET, a pour base un questionnaire diffusé directement auprès des athlètes depuis mai 1986. Les résultats définitifs seront communiqués dans un mois (1986), aujourd'hui je me propose de vous livrer une analyse globale des réponses arrivées avant le 15 septembre. La méthode d'analyse sera donc globale, j'espère pouvoir l'affiner par la suite.

METHODOLOGIE

Un questionnaire réponse directe des athlètes et pratiquants est diffusé :

1°- Une publication du questionnaire dans Canoë-Kayak Information n°7

2°- Une distribution par courrier aux Entraineurs nationaux, Conseillers techniques et responsables de Section Sport-Études

3°- Une distribution directe sur les différentes manifestations du calendrier national.

ANALYSE DE LA PATHOLOGIE

128 réponses analysées à ce jour : 15% de femmes, 85% d'hommes.

Pas de pathologie de l'épaule dans 35% des cas, mais elle est présente dans 65 % des cas.

• Les luxations glénohumérales : 30 %

• Elongation, déchirure, et rupture musculaires : 23 %

• Tendinites : 17 %

• Rupture de coiffe : 5 %

• Luxation acromio-claviculaire : 4 %

• Nevralgie cervico-brachiale : 3 %

ANALYSE PAR PATHOLOGIE

La luxation glénohumérale (LGH)

30 % des réponses positives,

2/3 de luxations vraies, 1/3 de subluxation.

Taux de récidive moyen : 2,28

• Légère prédominance des LGH chez les sujets ayant peu d'années de pratique, avec un entraînement modéré peu de luxation dans le.Haut Niveau.

• Le kayak est le plus souvent incriminé : 70 % kayak ,30 % canoë

• Prédominance des traumatismes du côté de la latéralisation (exemple épaule droite pour C1 bordé droit ou K main fixée droite.

• Légère prédominance du slalom, puis tourisme découverte, puis Rivière sportive.

• les gestes incriminés sont l'esquimautage surtout latéral mais aussi central puis les appuis en suspension ; à noter, mais loin derrière, les chocs pagaies sur un obstacle, ou du corps contre un obstacle.

• Pas de corrélation possible en fonction de la classe de la rivière.

• La LGH survient au cours d'une période d'activité normale ou de rupture de l'entrainement, très peu de LGH au cours des entraînements intensifs.

Thérapeutique

• Majorité de consultation de spécialiste et/ou généraliste

• En fait plus la luxation récidive, moins le sujet consulte et ceci est d'autant plus vrai pour les subluxations.

• Un bilan Rx dans la majorité des cas : 70 %.

• Recours à la kinésithérapie dans la majorité des cas : 70 %

• Immobilisation : strapping (contention élastique) 70 %, contention type Mayoclinic 35 %,

durée entre 7 jours et un mois ; durée la plus fréquente : 15 jours

• L'avis sur l'efficacité du traitement est très partagé.

Conséquences

83 % arrêtent complètement ou provisoirement l'activité. Ils retrouvent leur niveau de pratique initiale en un à six mois. 30 % disent ne jamais avoir retrouvé leur niveau de pratique antérieur. Dans 50 % des cas, persiste une limitation de mouvement ou une réaction d'évitement face à certaines manoeuvres.

L'épaule fait souffrir - quelque fois : 65%, - jamais : 15%, - souvent : 10%

 

La pathologie musculaire

23 % de la pathologie observée

- Élongation : 70%

- Déchirure : 20%

- Rupture complète : 10%

Le nombre d'années de pratique, l'intensité de l'entraînement n'induit pas d'écart significatif. La fréquence est identique en canoë et en kayak La pathologie survient principalement du côté de la latéralisation. La forme de pratique n'induit pas de différence significative. Les gestes le plus souvent incriminés sont l'esquimautage, l'appui en suspension .Les accidents musculaires surviennent le plus souvent en reprise d'activité et en début de séance.

 

Les tendinites

Elles représentent 17 % de la pathologie observée et se voient chez des sujets qui ont déjà un certain nombre d'années de pratique (6 à 12 ans de C.K.) et surtout chez ceux qui ont une pratique intense. 50% font plus de 12 heures de kayak par semaine et 30 % de 6 à 12 h par semaine.

On retrouve les tendinites chez le sportif de Haut Niveau.

Peu de gestes ressortent sauf globalement la propulsion et spécifiquement les débordés en canoë.

Il n'y a pas de différence entre kayak et canoë.

Les principaux pourvoyeurs de tendinites : Course en Ligne : 40%, Rivière sportive : 25%, Slalom : 25%

Thérapeutique

Consultations spécialisées : 43%, chez le généraliste : 25%, kiné seul : 20%.

Rx dans 30 % des cas.

Médicaments : 60 % des sujets :AINS - Antalgiques?

infiltrations, laser, ionisations, ultrasons.

Kinésithérapie : 50 % ; efficacité : très bonne : 13 %, assez bonne : 26 %, peu efficace : 15%, inefficace : 26%, sans avis : 22%

Reprise de l'activité en 1 mois en moyenne. 25 % des sujtes ne retrouvent pas leur niveau initial après six mois.

CONCLUSION

Voici donc globalement les premiers résultats que l'on peut obtenir de cette enquête, il est bien sûr possible d'affiner encore l'analyse, et surtout d'en tirer des conclusions et attitudes pratiques, c'est l'objet de la réunion de concertation du 9 et 10 mai à CHALAIN.

NDWM : Détails des résultats et conclusions dans la publication suivante :

Grippon P. : Pathologie de l'épaule et canoë-kayak. Thèse pour le diplôme de Doctorat en médecine, Université Paris Val-de-Marne, 22 juin 89, 192 p.