COLLOQUE MÉDICO-SPORTIF F.F.C.K. POITIERS 1997

NUTRITION et RECUPERATION après L'ÉPREUVE en CANOË-KAYAK

G. PERES Physiologie et Médecine du Sport, CHU Pitié-Salpétrière, 83, Bd de l'Hôpital, 75013 PARIS

  La récupération hydrique

Après l'entraînement ou la compétition, la restauration du capital hydrique doit être la plus précoce possible, s'accompagnant aussi d'une reconstitution des réserves glycogéniques musculaires et hépatiques, également immédiate, tout en n'omettant pas de compenser les pertes en sels minéraux, en vitamines et en oligo-éléments, liées à celles hydriques sudorales, et les dégradations protéiques, du fait de l'oxydation de certains acides aminés (leucine et autres A.A. ramifiés) et des micro-lésions musculaires.

Pour assurer une réhydratation optimale, il faut assurer la biodisponibilité la plus précoce possible de l'eau, ce qui implique une ingestion de boisson au plus tôt dès la fin de l'exercice et une vidange gastrique et une absorption intestinale les plus rapides possibles.

 

La vidange gastrique (VG)

Un état de déshydratation modéré facilite le transit hydrique, alors qu'une forte déshydratation, tout comme l'hyperthermie ou le stress, s'accompagne d'un ralentissement de la VG, aggravée par des perturbations ioniques (dysnatrémie ou dyskaliémie, dues à l'ingestion de boissons non appropriées, beaucoup d'eau pure pendant l'exercice, avec forts débits sudoraux, ou bien l'utilisation de substances ...).

Une boisson iso ou légèrement hypotonique par rapport au plasma quitte plus rapidement l'estomac. De même la vidange gastrique est inversement proportionnelle à la densité énergétique, ce qui réduit quelque peu l'intérêt des polyglucoses, maltodextrines et amidons solubles, et donc des « boissons de l'effort d'apport glucidique » qui en contiennent, en période de récupération, alors même qu'il est souvent recommandé de continuer à en ingérer. Leur poids moléculaire plus élevé permet des osmolarités plus faibles et donc des apports quantitatifs en glucose supérieurs à osmolarité identique, mais la densité calorique s'est depuis avérée aussi un facteur limitant de la vidange gastrique.

La présence de lipides a un effet encore plus freinateur sur la vidange gastrique.

Les particules, lorsqu'elles dépassent 2 ou 3 mm, ont un net effet ralentisseur. L'ingestion d'aliments solides ne devrait pas se faire avant une heure après la fin de l'exercice.

Une température de la boisson entre 8 et 15 °C est favorable à la vidange gastrique, faiblement, et permet de façon accessoire un rafraîchissement corporel par forte production de chaleur, que celle-ci soit endogène, exercice intense, ou exogène, température ambiante chaude.

De même une forte quantité d'eau, 0,6 litre et plus, quitte plus rapidement l'estomac ; elle n'est pas toujours agréable à supporter ....

A l'inverse, la présence d'un bol alimentaire au niveau duodénal ralentit la VG. Donc boire avant de manger à la fin de l'épreuve.

 

L'absorption intestinale

Ses facteurs, en relation avec l'exercice, sont encore peu connus et peut-être sous-estimés. Si le débit sanguin splanchnique est réduit, du fait de la déshydratation et de la vasodilatation cutanée pour la thermorégulation, et si l'on se réfère aux travaux expérimentaux réalisés au repos en ischémie ou en hypoxie, ayant montré dans ces conditions une réduction de l'absorption intestinale, celle-ci pourrait être encore perturbée pendant la récupération.

L'absorption intestinale est favorisée par la présence de chlorure de sodium et de glucose et l'isotonicité de la solution.

 

La régénération glycogénique

 

Parmi les objectifs de l'entraînement, et une des conséquences de la compétition, figurent la déplétion puis la reconstitution et l'augmentation, au dessus des valeurs initiales, des réserves glycogéniques dans les muscles sollicités par l'exercice. La stratégie nutritionnelle va y participer largement.

L'un des objectifs en compétition de fond en canoë-kayak est la gestion optimale du glycogène musculaire pendant l'épreuve, afin de faire correspondre son épuisement avec l'arrivée. Dans les épreuves de brevets, en principe plus ou moins hors compétition, randonnée nautique, ... la gestion des réserves glycogéniques est également importante. Tandis que, avant et après la compétition, il s'agira d'assurer la reconstitution la plus précoce et la plus importante possible des réserves glycogéniques musculaires.

Avant d'aborder les aspects pratiques de la récupération glucidique d'épreuves intenses et de durée plus ou moins longue, développons quelques aspects des modalités et des mécanismes de régulation et de contrôle du métabolisme des glucides dans l'organisme, depuis leur ingestion jusqu'à la synthèse du glycogène musculaire.

Il ne sera pas question de développer ici de façon exhaustive chacune des étapes successives de cheminement des glucides dans l'organisme, bien décrites par ailleurs (cf. les bons manuels de physiologie et de biochimie de nos premières années d'études ...).

Au cours de la phase buccale, les aliments sont triturés, réduits en particules plus petites selon la durée et la qualité de la mastication (rôle du coefficient dentaire, en particulier pour les randonneurs du troisième âge), ce qui va permettre une hydrolyse enzymatique ultérieure plus efficace par l'augmentation du rapport surface / volume de chaque particule et la rupture des structures fibreuses péri-amylacées qui limitent la diffusion et donc l'action des amylases. Cette action est essentielle et beaucoup de sportifs pourraient y prêter plus d'attention. L'ingestion de glucides sous forme dissoute (boissons) évite les aléas de cette étape.

A signaler, pour le sportif fort consommateur de glucides, la facilité avec laquelle certains produits amylacés (amidons extrudés) ou les glucides simples sont hydrolysés et fermentés dans la cavité buccale par les amylases salivaires et bactériennes, les rendant potentiellement cariogènes ; le pH de la plaque dentaire s'abaissant rapidement en la présence de ce type de produit (Björk et al 1984, cité par Bornet et al 1990).

Enfin pour ce temps buccal, signalons le rôle du goût, de l'appétence et donc du comportement de choix alimentaire, soumis aussi aux conditions d'environnement, particulièrement en ambiance chaude : les boissons glucosées « n'ont pas le même goût » : il faut en tenir compte lors de leur préparation, pour éviter écoeurement et bouche pâteuse.

La déglutition n'est pas toujours aisée dans certaines postures ou après des compétitions dures, l'arrière cavité buccale et le pharynx sont irrités et desséchés et il existe une dysphagie certaine. De petites et fréquentes gorgées de liquide frais passent mieux

L'étape gastrique est essentielle dans le transit du bol alimentaire, la biodisponibilité des substrats énergétiques. Pourtant son rôle dans la digestion des glucides paraît modeste, tout juste peut-être l'action des amylases salivaires pourrait se poursuivre, tant que le pH local reste supérieur à 4, mais ... l'estomac est souvent « acide » après l'épreuve. C'est un argument sérieux en faveur de l'ingestion de glucides simples.

De fait l'estomac est surtout, comme nous l'avons décrit au chapitre précédent, un réservoir régulant son débit de vidange sous l'influence de nombreux facteurs.

À l'étape duodénale, l'amidon est hydrolysée et ses constituants élémentaires absorbés, tandis que les glucides simples sont absorbés directement, mais de façon très différente, processus actif pour le glucose avec participation d'un transporteur actif et consommateur d'énergie, le SGLT1, et passif pour le glucose et les autres glucides simples, fructose en particulier (GLUT 5), d'où une absorption plus lente par ce dernier mécanisme. Il existe cependant une synergie entre ces monosaccharides, la présence de glucose accélère l'absorption de fructose.

Après atteinte du compartiment sanguin, le glucose plasmatique pénètre dans les cellules, selon le sens du gradient de concentration. Ce transport est facilité par des transporteurs de glucose (GLUT), sensibles (GLUT4) ou non (GLUT1) à l'insuline pour ceux musculaires et hépatiques. Il s'agit d'une étape qui est actuellement considérée comme clef, dans la mesure où elle serait limitante de la resynthèse du glycogène, plus que ne le seraient les activités des enzymes directement impliquées dans cette synthèse dans la cellule. La présence et plus, la teneur en glucose intracellulaire, est la condition d'une resynthèse rapide du glycogène, le transport de glucose est limitant de son utilisation dans la cellule où il ne s'accumule pas sous forme libre, (Katz et al 1988 et Ziel et al 1988), ce qui implique :

- une glycémie suffisante : la captation cellulaire du glucose lui est corrélée (Nesher et al 1985). Un apport insuffisant en glucides après déplétion du glycogène musculaire (exercice) n'est suivi que d'une resynthèse partielle de celui-ci (Bergström et al 1967, Maehlum et al 1978 et Ivy et al 1988), et

- une perméabilité membranaire au glucose élevée. Cette dernière est accrue après déplétion, par exemple sous l'effet de contractions musculaires ou sous l'influence de l'insuline (Fell et 1982, Holloszy et al 1965, Ivy et al 1981, Richter et al 1982 et 1984). Les GLUT subissent une translocation vers la membrane du sarcolemne, nécessaire à leur activité, sous l'influence de l'exercice (GLUT1) ou de l'insuline (GLUT4). Une insulinémie insuffisante (diabète) restreindra la resynthèse glycogénique (Ivy 1977, Maehlum et al 1977).

La sur-expression du GLUT1 dans les muscles epitrochlearis, EDL et quadriceps d'une souche de souris transgéniques, a permis d'augmenter le transport de base du glucose dans ces muscles de 6,6 à 7,7 fois, in vitro. Dans ces conditions, le glucose musculaire augmente de 4 fois et le glycogène de 10 fois, avec d'ailleurs une faible augmentation de l'activité de l'hexokinase (+ 10 %) et sans augmentation correspondante de l'activité de la glycogène synthétase (Ren et al, 1993).

Rappelons que l'augmentation « excessive » (mais à partir de quel taux l'est-elle, avec quelle variabilité interindividuelle, ... ?) du glycogène musculaire pourrait être toxique pour la cellule (rhabdomyolyse). Par contre la resynthèse la plus précoce possible ne serait que favorable.

La synthèse du glycogène, forme polymérisée de stockage des glucides dans les organismes animaux, dans le sarcoplasme du muscle strié ou du foie, avec des liaisons 1-4 et 1-6. Dans la cellule le glucose est rapidement transformé en glucose-6-phosphate (G-6P) par une hexokinase, puis en glucose-1-phosphate (G-1P) par une phosphoglucomutase. Le G-1P se combine à un uridine-triphosphate (UTP) pour former de l'UDP-G, transporteur d'un glycosyl. Celui-ci va se fixer au niveau du résidu terminal non réduit de la chaîne de glycogène pour former une liaison glycosidique de type (-1-4. La réaction est catalysée par la glycogène-synthétase. Une amylotransglycosylase permet le transfert d'un fragment d'oligosaccharide de la position 4 sur le groupement hydroxyl en 6 d'un résidu de glucosyl, créant ainsi un branchement.

La glycogène-synthétase est une enzyme allostérique, comportant un site spécifique et des sites régulateurs. Elle existe sous la forme D, peu active, et, après activation par le G-6P, I, très active, ceci de façon inversement proportionnelle à l'importance des réserves glycogéniques (Danforth 1965). Le passage d'une forme à l'autre est contrôlé par des réactions de phospho-déphosphorylation, dépendantes de phosphokinases. Quand 3 à 6 sites de phosphorylation de la glycogène-synthétase sont phosphorylés, en particulier par la présence de G-6P, la forme D prédomine (Roach et al 1976 et 1977, Huang et al 1980).

L'insuline est un activateur puissant, augmentant jusqu'à 8 fois la vitesse de synthèse du glycogène musculaire (Richter et al 1982). Sous l'effet de l'entraînement en endurance (James et al 1984), une augmentation de la forme I a été bien démontrée, pour des insulinémies identiques, et induit une importante resynthèse de glycogène. La forme D est également active, mais nettement moins (Kochan et al 1979). Les glucocorticoïdes sont inhibiteurs exogènes de la glycogène-synthétase, ce qui peut avoir quelque signification au cours de l'exercice, la cortisolémie s'élevant, ou à son décours, dans certaines circonstances peu physiologiques ... et peu éthiques.

La resynthèse du glycogène musculaire s'effectuerait en deux phases. la première, rapide, sur 24 h environ, puis la seconde sur un à deux jours supplémentaires, chez le sportif très entraîné dans ce domaine énergétique, plus progressive, aboutissant à la « surcompensation », et dépendant apparemment tant de l'alimentation que des modalités de l'exercice antérieur (Ivy 1991).

Lors de la 1ère phase, la resynthèse du glycogène tiendrait :

- à l'activation du transport du glucose par un effet résiduel de l'exercice et par l'augmentation post-exercice de l'insulinémie, avec une modification de l'activité des transporteurs membranaires de glucose (GLUT) (Treadway et al 1989).

Ainsi l'activité contractile a augmenté la perméabilité du muscle au glucose, par exemple encore de 10 fois 1 h après un exercice modéré (Ivy et al 1981), même en l'absence d'insuline (Holloszy et al 1965 et 1986).

Après l'exercice, la sensibilité à l'insuline, importance de la réponse pour une même quantité d'insuline, augmente de 5 à 10 fois (Zordano et al 1986). Après exercice intense, elle retourne, chez le rat aux valeurs initiales en 18 h si l'alimentation est hyperglucidique, en 48 h si elle est hypoglucidique (Cartee et al 1989). Mais dans ce second cas de figure, la resynthèse du glycogène musculaire est finalement moindre.

- à la libération, du fait de l'utilisation du glycogène à l'exercice, des glycogène synthétase et phosphorylase, activant la conversion en forme I de la synthétase. A celle-ci s'ajoute l'action de l'insuline (Danforth 1965).

Lors de la 2e phase, la surcompensation glycogénique musculaire a été bien mise en évidence par l'expérience de Bergström et al (1967) : après déplétion glycogénique d'un membre inférieur par pédalage jusqu'à épuisement à 75 % de Vú O2max, le régime hyperglucidique les 3 jours suivant avait permis une restauration, à son taux initial après 24 h et à un taux 2 fois supérieur à celui avant exercice, après 3 j, du glycogène musculaire dans le membre exercé et déplété en glycogène, sans changement significatif dans l'autre membre. Les mécanismes intimes de cette surcompensation ne sont pas encore bien élucidés.

Cependant une augmentation persistante de l'activité de la glycogène synthétase et surtout des transporteurs de glucose GLUT4 a été démontrée. Leur nombre et leur activité s'accroissent en effet sous entraînement sportif d'endurance, effet pré et post-transcriptionnel, mobilisation et synthèse avec la participation des ARNm (Klip et al 1990).

Mais la perméabilité au glucose a diminué ainsi que l'activité de la synthétase I, tandis que l'activité de l'hexokinase et l'insulinémie restent encore élevées, avec l'apport important en glucose (Ivy et al 1985).

L'activité accrue de la glycogène synthétase, l'augmentation de la perméabilité cellulaire au glucose et l'augmentation de l'insulinémie, secondaires à une ingestion accrue de glucides, participent donc à l'augmentation de la teneur en glycogène du muscle, de 80-100 mmol/kg de muscle frais chez le sédentaire, à 130 mmol/kg environ en période d'entraînement quotidien, 170 mmol/kg après récupération-régénération de 3 jours, au repos, et jusqu'à 210 mmol/kg après régime hyperglucidique approprié (Bergström et al 1967, Hultman 1967, Sherman et al 1983 et Sherman et al 1981).

Par la méthode du clamp euglycémique avec perfusion de glucose et d'insuline, il a été démontré un transport plus rapide du glucose dans les fibres ST, probablement en raison d'un nombre plus élevé de GLUT (James et al 1985, Kern et al 1990), avec une synthèse de glycogène en proportion (Richter et al 1988, Rothman et al 1990). Le transport du glucose, surtout, et l'activation de la glycogène synthétase sont, rappelons-le, deux des étapes, les étapes-clé de la synthèse du glycogène musculaire (Friedman et al 1991).

La stratégie nutritionnelle lors de la récupération d'épreuves intenses et de longue durée tient compte de ces cinétiques et facteurs de synthèse avec surcompensation du glycogène musculaire.

Quels seraient les glucides à recommander ? Les objectifs sont une recharge la plus précoce, la plus importante, puis la plus prolongée possible des glycogènes musculaire et hépatique, et leur utilisation la plus faible possible en période de jeûne nocturne, mais également, de permettre une transformation de glucides en acides gras rapidement mobilisables en début d'exercice. Il s'agira d'ingérer des glucides simples très rapidement absorbés, mais d'éviter une hypoglycémie nocturne, par exemple du fait de l'ingestion de glucides trop rapidement assimilés et fortement hyperglycémiants puis hyperinsulinémiants, non relayés par des glucides complexes et d'absorption plus lente. Il faut aussi éviter les divers troubles digestifs secondaires à l'ingestion de certains glucides, légumes secs, en excès.

Profitons de ce chapitre pour une digression sur les glucides, peut-être encore d'actualité, tant certaines idées reçues ont la vie dure. Celles sur les « glucides simples tous rapides » et « complexes tous lents » sont fausses.

Les glucides n'ont d'abord pas la même valeur en tant que macronutriments, type de glucides, ou bien qu'aliments. Les mono et disaccharides, glucides simples, glucose, fructose, galactose, lactose, saccharose, diffèrent des glucides complexes, enchaînement de nombreuses molécules de glucose, glycogène des animaux ou amidon des plantes, avec, entre les deux les maltodextrines et polyglucoses, chaînes courtes de glucose. En termes d'aliments, ils sont simples ou transformés avec la présence d'autres macronutriments et micro-nutriments, et sont l'objet d'ajouts, d'incorporation et de modes de préparation très variés.

Dans le cadre de l'alimentation du sportif, la tendance actuelle est de répartir les glucides selon leur index glycémique (IG), rapport entre l'aire de la courbe de glycémie au dessus de celle de repos de l'aliment testé à l'aire de courbe glycémique du glucide de référence, le glucose. L'IG est faible, moyen , élevé ou très élevé selon l'amplitude de la réponse glycémique.

Or l'IG des glucides simples peut être très élevé (maltose, glucose), élevé (saccharose) ou faible (fructose), réfutant ainsi l'idée reçue des « glucides simples tous rapides ». Parmi les fruits, raisins et banane mûre ont un IG très élevé et la pomme et l'orange, faible.

De même, l'IG des glucides complexes peut être très élevé (corn flakes, ou pétales de maïs, carotte, pommes de terre en flocons, pain blanc, gâteaux secs confiturés, barres chocolatées, miel, confiture), élevé (riz, pain complet, pommes de terre à chair ferme, muesli, biscuits type petit beurre, barres céréalière), moyen (spaghettis, biscuits très secs ou gâteaux secs chocolatés) ou bas (pois, lentilles et haricots), avec pour ces derniers l'inconvénient de fermentations coliques. Ces différences tiennent à la structure des grains d'amidon, à leur teneur respective en amylose, chaînes droites relativement résistantes, et en amylopectine, chaînes droites et ramifiées et de ce fait plus facilement hydrolysées par les amylases digestives.

Les modes de préparation et de cuisson de l'aliment peuvent modifier l'IG : les riz concassé ou blanc ont un IG très supérieur à celui en grains ou complet. L'IG est plus faible, pâtes cuites al dente avec peu d'eau. La présence de lipides ou de protéines diminue l'IG.

Le délai par rapport au repas précédent et sa composition influencent aussi l'IG : un dîner abondant avec glucides « lents », protéines et lipides est suivi, lors du petit déjeuner suivant, 8 à 10 h plus tard, d'un effet hyperglycémiant moindre des glucides ingérés, quel que soit leur IG.

Il existe des différences considérables interindividuelles d'IG pour un même produit ou une association de produits dues aux aptitudes digestives individuelles.

Enfin signalons en passant &emdash; la santé publique est en jeu !&emdash; que cet index glycémique a des retombées intéressantes actuelles, c'est l'une des explications aux erreurs du grignotage, avec ingestion répétée de glucides simples à IG très élevé, se traduisant par une hyperglycémie suivie d'une hyperinsulinémie puis d'une hypoglycémie réactionnelle avec fringale et incitation à une ingestion nouvelle, et ainsi de suite. La surconsommation de glucides simples (effet « coca - barres chocolatées des nord américains ») conduit à une saturation, chez ces sujets peu actifs, des réserves de glycogène, et le surplus est transformé en acides gras, triglycérides et tissu adipeux. C'est l'une des origines de l'obésité des adolescents, avec aussi la consommation élevée de lipides (chips, beurre de cacahuètes), dont on sait qu'ils vont directement former du tissu adipeux.

 

Pour le sportif, les glucides simples à IG très élevé ont l'avantage essentiel d'une biodisponibilité très rapide pendant et après l'exercice, leur inconvénient est souvent une insuffisance en micro-nutriments. L'intérêt des glucides complexes à IG moyen est le maintien d'une glycémie modérée pendant un temps prolongé, mais leur inconvénient est une disponibilité retardée.

Que proposer donc ?

Après l'épreuve le restockage précoce du glycogène musculaire implique une vidange gastrique rapide de l'eau et une captation cellulaire précoce avec perméabilité membranaire au glucose élevée dans un environnement métabolique et hormonal favorable.

Précisons d'abord que, même avec la meilleure stratégie nutritionnelle, le restockage de glycogène après l'exercice ne dépasserait pas en moyenne 80 µmol/g de muscle et par 24 h chez le sportif très entraîné (Costill et 1981). Probablement la recharge en glycogène du muscle est incomplète d'un jour à l'autre en cas d'entraînement quotidien prolongé et demande 2 à 3 jours (cf. ci-dessus) (Bergström et al 1967 et Piehl 1974) malgré une consommation quotidienne de 250 à 350 g de glucides (Costill et al 1971). Mais l'ingestion de plus grandes quantités de glucides, jusqu'à 600 g et plus, ou 10 g/kg/jour, chez des sportifs très entraînés permettrait des recharges glycogéniques plus rapides et plus élevées.

La vitesse de resynthèse du glycogène après exercice s'effectue en 2 phases, selon une courbe exponentielle décroissante, avec une vitesse initiale plus élevée pendant la première (Conlee et al 1978 et Terjung et al 1974), voire les 2 à 4 premières heures (Bogardus et al 1983) et diminution progressive les 18 heures suivantes (Cartee et al 1989). Cette resynthèse était de 8 µmol/h/g de muscle épuisé préalablement de son glycogène, les 2 premières heures (Maehlum et al 1977) et 5 µmol/h/g les 5 premières heures (Keizer et al 1986), sous apport de 100 à 300 g de glucides, à partir de 15 min après la fin de l'exercice.

La précocité de l'ingestion de glucides est donc essentielle à une resynthèse rapide du glycogène. Retarder de 2 h l'apport de glucides après la fin de l'exercice fait passer la vitesse de resynthèse du glycogène de 7,7 à 2,5 µmol/h/g de muscle (Ivy et al 1988). Après les 2 premières heures post-exercice, la poursuite ou le début de la prise de glucides s'accompagne d'une vitesse de resynthèse d'environ 4 µmol/h/g, ne différant pas entre les 2 régimes. L'apport différé se traduit par une resynthèse diminuée de 45 %.

Quelles quantités et quel type de glucides ?

Des taux proches de resynthèse du glycogène musculaire (5,7 µmol/g/h) étaient observés (Blom et al 1987), lors de l'ingestion de 0,7 ou 1,4 g/kg de glucose à 2 h d'intervalle. L'ingestion de 0,35 g/kg fait chuter la resynthèse de 50 % environ (2,1 µmol/g/h). De même l'ingestion de 1,5 ou 3 g/kg de poids corporel de polymères de glucose (G) immédiatement et 2 h après un exercice épuisant, soit 225 et 450 g en tout, permet une remontée de la glycémie et de l'insulinémie au dessus des valeurs de repos, se prolongeant au delà de 4 h (Ivy et al 1988b), ce qui n'est pas observé sans ingestion de G.

La resynthèse de glycogène est proportionnelle, de façon non linéaire, à l'apport glucidique sur 24 h, pour des apports allant de 188 à 648g/j (Costill et al 1981). Il a pu être démontré un facteur limitant au niveau de la vidange gastrique et de l'absorption intestinale des glucides, pouvant ralentir finalement les débits et capacités maximaux de resynthèse du glycogène.

Des expériences de perfusion (cf. ci-dessus) ont permis de montrer des taux de resynthèse plus élevés : la perfusion de 2,9 ou 5,1 g de glucose/kg de poids corporel s'accompagne d'une vitesse de resynthèse du glycogène musculaire de 12,1 ou 24,9 µmol/kg la première heure après l'exercice (Ahlborg 1967). De même lors de la perfusion de 4 (Bergström et al 1967) ou 8 (Roch-Norlund et al 1972) g/kg de glucose en 4 h après l'exercice, le restockage en glycogène du muscle est respectivement de 25 et 33 µmol/kg/h dans les 2 h suivant la fin de l'exercice. Si le glucose est remplacé par du fructose, la resynthèse de glycogène est d'environ 1/3 moindre (Bergström et al 1967). Ce qui a été confirmé au niveau du muscle (Blom et al 1987 et Conlee et al 1982) n'est pas vérifié pour le foie : la perfusion de fructose permet en 3 h un stockage hépatique en glycogène 3 fois supérieur à celui obtenu avec du glucose (Nilsson et al 1974), peut-être en raison d'une activité fructokinase plus élevée dans le fois que dans le muscle (Newhsholme et al 1973). L'ingestion de glucose et de fructose en petite quantité ou même de saccharose permet finalement un restockage glycogénique optimal du muscle et du foie, celui-ci captant le fructose de façon préférentielle et le glucose ainsi a une meilleure pénétration musculaire (Blom et 1987).

L'ingestion de saccharose, en quantité comparable, est aussi efficace que celle de glucose, peut-être en raison d'une captation préférentielle du fructose par rapport au glucose par le foie, d'où une quantité de glucose disponible pour le muscle ayant travaillé plus importante.

L'ingestion immédiate de glucose, relayée rapidement par des féculents (amidon) ou du glucose seul, se traduit par une 1ère phase (24 h) de resynthèse identique, mais une seconde phase, 2ème jour et suivants, avec un glycogène musculaire plus élevé sous amidon (Costill et al 1971), probablement en raison de sa capacité à maintenir une insulinémie élevée plus prolongée (Hodges et al 1965).

La démonstration du rôle éventuellement limitant du tube digestif a été apportée par l'étude comparée du restockage en glycogène du muscle après exercice, lors de l'apport oral (aux temps 0 et 120 min) en solution de polymère de glucose ou lors de perfusion de glucose (sur 4 h), en quantités identiques (3 g/kg) (Reed et al 1989). La glycémie s'élève plus tôt et plus lors de l'administration par voie intra-veineuse, donc le transit digestif a été limitant, mais dans cette étude les vitesses de restockage du muscle en glycogène (tout comme les insulinémies) ne différaient pas (6,5 µmol/g/h) et étaient inférieures à celles décrites précédemment, pour des raisons de choix de conditions expérimentales, loin d'être optimales.

Ainsi, avec la technique du clamp euglycémique, la disponibilité du glucose augmente avec la quantité d'insuline perfusée, ainsi que le stockage de glycogène (Young et al 1988). Et la perfusion chez le rat, pendant 7 h, d'insuline à des taux pharmacologiques et de glucose (11 à 13 mmol/L) augmente les teneurs en glycogène respectivement de 2, 3 et 3,5 fois les valeurs de repos dans les fibres FTB, ST et FTA (Richter et al 1988). Mais pendant la perfusion, l'activité de la glycogène synthase diminue, le glucose libre et le G-6P intracellulaire augmentent, signifiant que la disponibilité du glucose diminue. L'intérêt réside dans la précocité de la resynthèse glycogénique.

Finalement, il est recommandé l'ingestion régulière, tous les quarts d'heure, de 0,15 à 0,4 l (un à trois verres), dès la fin de l'exercice, de boissons avec du glucose et un peu de fructose, en solutions proches de l'isotonicité (40 à 70 g/l de glucides), selon le dégré de déshydratation et le besoin de resynthèse en glycogène. Elle se fera par exemple sous forme de jus de fruit (raisin, majorité de glucose) ou de boissons fruitées, diluées avec de l'eau du robinet, de source ou minérale bicarbonatée, à raison de 0,2 à 0,4 g de glucides/kg/15 min (1 l de jus de raisin contient environ 145 g/l de glucides) (pour des quantités supérieures par prise, la fréquence des troubles digestifs, nausées, diarrhée est élevée). Ceci est à poursuivre pendant 6 heures et plus. A partir d'une heure, également ingestion de protéines sous forme digeste, jambon ou viande maigre à bien mâcher, une centaine de grammes, répétée toutes les deux heures, à défaut de repas. A partir d'une ou deux heures, aux boissons peuvent en partie s'ajouter des apports glucidiques solides, simples et complexes d'index glycémique élevé à très élevé, et ceci d'autant plus que l'on s'éloigne de la fin de l'épreuve.

Cette récupération des réserves hydriques sera poursuivie très régulièrement jusqu'à 24 h et plus parfois, y compris au repas après compétition.

Le premier repas après l'épreuve (2 à 4 h)

Ses objectifs sont de parfaire la réhydratation, l'apport en sels minéraux, ..., maintenir la glycémie et favoriser la complémentation des réserves glycogéniques, le tout sans surcharger le tube digestif.

Il est conseillé un repas normocalorique, hyperglucidique (70 % de l'AET), simple et complexe, normal en protéines (12 % de l'AET) et peu de lipides. Par exemple entrée, soupe de légumes, plat principal de féculents, pommes de terre cuites à l'eau, avec viande rouge (là aussi idée reçue à réformer) ou blanche grillée, puis fromage blanc ou yaourth, et fruit, avec ingestion de 2 ou 3 verres d'eau plate, sans oublier le pain en accompagnement.

 

L'alimentation lors de la phase de récupération mérite autant d'attention, d'attitude professionnelle qu'à tout autre moment de la pratique sportive.